Ma montre affichait les 19 heures. Il commençait à faire nuit tandis que je traînais encore dehors. J’apercevais de temps en temps quelques types louches au coin des rues. Rien de bien intéressant. Je traçais ma route avec comme destination la Guilde, plus précisément vers ma chambre. C'est alors que j'entendis quelqu'un, une voix grave, agaçante même. Il m’appelait et me faisait signe de le rejoindre.

- Qu'est ce qu'il me veut lui...

J'approchais d'un pas hésitant et gardais une certaine distance de "sécurité".
Au début, je n'arrivais pas à comprendre ce qu'il racontait. Un paquet de cigarette? De l'argent? Seulement quelques mots étaient compréhensible dans toute cette cacophonie. Mais cela n’annonçait rien de bon, alors je décidais de reprendre ma route. Au moment ou je me tournais, deux types, grands, mais surtout très bourrés me barraient la route. Je passais ma main sur mon front, leur demandant gentiment de me laisser passer. Les deux personnes éclatèrent de rire. Pourquoi? Y avait-il quelque chose de drôle? Sans réponse, je décidais de les contourner mais eux aussi se déplaçaient afin de ne me laisser aucune possibilité de m’échapper. Je ne voulais pas de problèmes. La dernière chose qu'il me restais à faire était un demi tour, puis j'emprunterais une autre route.
C'était trop tard. J'avais presque oublié l'individus derrière moi. Il venait de m'enfoncer un petit poignard dans la hanche. Heureusement pour moi, la lame était assez petite, il n'y avait pas de quoi s’inquiéter. Enfin... Quand il retira la lame pour me poignarder à nouveau, je bloqua ces gestes, l’immobilisant, la lame sous son cou. Je rigolais en les voyant hésiter. Est-ce qu'ils devaient répliquer? Bien sûr que non. Je ne souhaitais pas faire de blessés, alors d'un geste de la main, je repoussais la personne dans les bras de ces deux camarades. Le poignard toujours en main, ils me laissèrent passer sans broncher. Je faisais tout pour ne pas boiter, pour ne pas leur paraître faible et ainsi, éviter une nouvelle confrontation.

Maintenant que j'étais plus loin, je fis un arrêt dans les toilettes publiques. Malgré la saleté environnante des lieux, j'arrivais à mettre un peu d'eau sur la plaie. Pourquoi fallait-il que cela tombe toujours sur moi? Je regardais les murs de la pièce mal éclairés quand mon regard se porta sur une petite affiche. Un concert dans un café? Il avait déjà commencé depuis quinze minutes environs. N'ayant pas l'envi de rester ici, je me décidais à aller jeter un oeil sur ce qu'ils appelaient: "l’évènement du mois". Avec le peu de moyens dont je disposais, j'avais fais un bandage discret, à peine visible pour éviter que le sang continu de couler.
Je marchais de nouveau dans la rue, faisant quelques pauses contre les murs. La blessure me faisait mal. Mal? Non... Ce n'était rien... Il fallait que je pense à autre chose, voila tout. Je me laissais guider par le bruit, et arrivais devant le café. Il y avait trop de monde, et passer inaperçu avec ma blessure serait une tache trop difficile. J'espérais simplement ne pas retomber sur les trois types qui m'avaient quelque peu causé des problèmes. Je faisais demi tour, en me disant qu'un autre chemin, même plus long serait une bonne initiative. Longeant les murs, j'allais de ruelle en ruelle, me destinant à une traversé de la ville estimée à vingt minutes de plus que si j'avais repris le chemin ou l'on m'avait abordé.
L'envie d'aller voir un médecin commençait à se faire sentir, mais à cet heure, le rendez vous était plutôt destiné à l’hôpital le plus proche. Je ne voulais pas y aller. Ou demain peut être. Malgré ce que je pouvais ressentir, j'avais juste envie de rentrer chez moi, au plus vite.

Normalement, ça devrait vite s’arranger. C'est ce que je me répétais sans cesse dans ma tête. Etant un vampire, et presque noble qui plus est, les blessures de ce type mettaient moitié moins de temps à guérir que pour un banal être humain. Alors, pas de quoi m’inquiéter, si ce n'est la perte considérable de sang qu'il me faudra retrouver rapidement, si je ne veux pas finir dessécher.
Un bruit m'interpelle, une porte qui s'ouvre et se ferme, mais ma vision se trouble légèrement et me désoriente en quelques secondes. Un genoux au sol, je lève la tête et regarde devant moi. Je ne peux pas m'arrêter la, la blessure n'est pas grave, je dois continuer. Essayant de m'en convaincre depuis le début, je me relève tant bien que mal en m'appuyant sur le mur, paroi glissante. Assez glissante pour qu'à peine trois secondes après, mon autre genoux rencontre à son tour le gravier.

- Quelle merde.. Dis-je en un soupire.

Je me devais de fustiger mon pessimisme qui frôlait le défaitisme. Un soupire, deux, trois, et me voila debout. Ah elle était belle la jeunesse, ça oui! Par terre pour un moindre mal. J'avais déjà reçu bien pire comme blessures, mais ça faisait quelque temps déjà, alors j'avais a moitié perdu mes habitudes. Choc électrique dans mon corps et le tour est joué. Étonnant d'ailleurs que je n'y ai pas penser plus tôt. Je sais très bien que ce n'est pas la meilleure solution, mais s'en est une tout de même. Ma main appuie sur la blessure et je sens passer au travers de mes doigts quelques filets de sang. C'est alors qu'une idée bien étrange me traverse la tête. Peux etre qu'avec le courant, il était possible de brûler la plaie, pour la cautériser? Mais je ne m'y risquerais pas. J'avais pas envie de ressembler à un savant fou, puisqu'il y avait de grande chances que je n'y arrive pas du premier coup.
Me voila donc en train de marcher, me rapprochant d'une silhouette, celle d'une jeune fille je crois. J'ai du lui faire peur, elle ne bouge pas d'un poil. Mes yeux se ferment et s'ouvre plusieurs fois pour tenter de discerner le visage de celle-ci. Elle ne me parait pas étrangère, du moins, c'est ce que me dit ma vison brouillée. Tenter une approche dans mon état? Je laisse échapper un petit rire. Vaut mieux pas, non. L'odeur de sang, même s'il s'agit du mien me donne très soif. Peut être qu'une gorgée de sang de la demoiselle passerait inaperçu? ... Je décide donc de m'approcher, l'air normal, marchant normalement, tant pis si j'ai l'air d'un détraqué. Je laisse juste une petite traîné de sang derrière moi, et plus j'y pense, plus je me sens bien. J'avais oublié a quel point la souffrance était reposante et me rendait fort. Quelques pas encore, et j'arriverais face à elle.